Par le fondateur de la méthode ACM © Agile Consulting Method, Guillaume COURSIN.
En 2011, j'écrivais ceci sur un groupe Linkedin :
"Cela faisait un moment que je voulais poster cet article mais le temps m'avait manqué. Alors je suis très heureux de le publier enfin, ce 27 février 2021, pour vous partager les fondements d'une méthode de conseil que j'ai imaginée en 2012 ... 9 ans déjà:-). La méthode ACM © souhaite mettre l’agilité au cœur des missions de conseil afin de répondre à un double enjeu : celui de la valeur apportée aux clients, et celui du bien-être des consultants qui interviennent sur les missions de conseil. Ayant moi-même expérimenté ce que je décris dans ma méthode, tant dans les phases d’avant-vente que sur des missions de conseil, j’espère que les cabinets de conseil trouveront dans cette méthode un peu d’innovation, beaucoup de pertinence, la passion de faire avancer cette méthode, la folie et l’envie de redonner vie au vrai conseil. Loin de la recette toute faite,cette méthode se veut participative, tirée par l’intelligence collective, et ne pourra trouver sa voix qu’avec la participation des clients du conseil, et lescontributions des consultants engagés. A cette fin, j’ai ouvert ungroupe Linkedin qui vous permet de partager vos pratiques de consultants avecnotre grande communauté, alors n’hésitez pas à poster vos contributions.r"
Alors, j'ai décidé en 2024 d'en faire un actif de la communauté Laniakéa, et de travailler avec la communauté Laniakéenne sur le développement de cette méthode. Après tout, on n'est jamais mieux servi que par soi-même et ses proches.
Ne m'en veuillez pas, j'ai conservé les illustrations Woody Allen pour le fun. J'espère que cela ne pertubera pas le lecteur sur le sérieux de la méthode :-). D'ailleurs, connais-tu la différence entre "Méthode", "Méthodologie" et "Framework" ?
En reprenant ce contenu, je me suis dit qu'il était d'autant plus pertinent aujourd'hui avec l'avenement de l'intelligence artificielle, car l'IA intervient alors comme un "n-ième outil de réponses" aux questions que se pose les clients. Le consultant doit donc désormais maîtrisé les solutions d'IA aussi bien que les autres outils à sa disposition, telle que l'intelligence collective.
Aller, on y va ...
Introduction à l'agilité
L’agilité a marqué un tournant important dans la manière de développer des logiciels informatiques, en créant d’une certaine manière, une école partageant des paradigmes communs formalisés au travers du manifeste agile [à lire].
Ayant moi-même grandi [enfin après ma puberté] dans un cabinet de conseil et de services numériques, en quittant Accenture, et en créant mon entreprise, j’ai découvert en 2012 cette discipline inspirante.Tellement inspirante que je me suis demandé comment l’agilité pouvait se mettre en musique sur des missions de conseil, par exemple, des missions de schémas directeurs, expertise que j'avais développée pendant ces quelques années passées chez Accenture.
J’en suis venu à initier la méthode ACM ©, Agile ConsultingMethod car je pense qu’elle mérite d’être appliquée par le plus grand nombre. Cette publication est aussi une publication de lancement pour permettre à chacun de participer à l’enrichissement de cette méthode en rejoignant la communauté Laniakéa.

Définissons ensemble la mission de conseil
Afin de définir le cadre d’application de la méthode ACM ©,il convient avant tout de se reposer la question de la nature même d’une mission de conseil. Il ne s’agit pas ici de philosopher sur cette question,mais de fournir simplement le cadre d’usage de la méthode ACM ©.
Disons simplement que la mission de conseil consiste à produire des documents (généralement appelés livrables) qui formalisent des réponses à des questions que nous posent les clients. Ces livrables peuvent prendre des formes diverses et variées généralement produits à partir de solutions bureautiques telles que Word, Excel,Power Point [le fameux !], Visio et leurs équivalents dans le monde Apple. Pour les cabinets les plus innovant, l’étendue des solutions de production de ces livrables est bien plus large, des solutions d’infographie, aux solutions BPM, voire jusqu’à des prototypes sous diverses formes qui permettront aux clients de mieux comprendre le conseil apporté, de s’approprier la réponse voire porter ou transmettre ce conseil auprès d’autres parties prenantes, et/ou de toutel’organisation cliente. Désormais, l'IA s'est aussi largement invité dans la gamme des outils à disposition pour le consultant.

La méthode ACM © s’applique a priori à toutes les missions de conseil même si je ne l’ai pas encore moi-même exécutée sur toutes les typologies :
· Diagnostic de situation (organisationnelle,culturelle, Business, IT, …)
· Etude d’opportunité
· Benchmark
· Stratégie d’Entreprise
· Schéma Directeur métier et IT
· …
La méthode ACM © s’intègre a priori sans difficulté aux autres méthodes de travail, en particulier celles destinées à conduire des missions de conseil (pour lesquelles d’ailleurs, il existe peu de méthodes standardisées reconnues sur le secteur du conseil, chacun proposant des démarches basées sur son expérience ou transmises par les anciens) avec,par contre, une fâcheuse tendance à pratiquer le copier/coller.
Dommage que vous ne puissiez pas laisser de commentaires sur ce blog, il faudra désormais rejoindre la communauté Laniakéa si vous avez envie de réagir, et intéragir avec nous sur ce sujet.
Pourquoi appliquer l'agilité aux missions de conseil ?
L’agilité est une école qui cherche à répondre à de nombreux enjeux, notamment celui de la réactivité face à un environnement changeant, qui peut être très concurrentiel pour l’entreprise. Elle trouve donc ses fondements dans la recherche systématique du« time to market » et surtout la volonté de fournir des produits, des solutions, des offres « à valeur ajoutée ».
De mon expérience, les missions de conseils sont exactement dans cet environnement :
· Parce que le consultant engagé dans une missionde conseil évolue bien souvent dans un environnement qu’il va découvrir au fur et à mesure de la mission, au fil des rencontres et des échanges avec les différentes parties prenantes de la mission de conseil, parfois bienveillantes vis-à-vis de la mission de conseil en cours, parfois en opposition ou en concurrence avec cette mission et les conclusions possibles de cette mission,
· Parce que l’équipe de consultants est généralement engagée au forfait sur une période fixe, sur un planning très contraint, et généralement dans un agenda également contraint par des évènements extérieurs (actions de communication du top management, exercice budgétaire, etc.)
· Parce que le donneur d’ordre achète généralementses missions de conseil à des prix plus élevés [ndlr : je parle du TauxJournalier des Consultants], voire bien plus élevées, que d’autres types de prestation. Au-delà des livrables et du nombre de slides rédigées, il attend de la valeur ajoutée, pour lui-même, pour l’entreprise et ses parties prenantes,voire pour des parties prenantes qui peuvent être extérieures à l’entreprise(partenaires par exemple). Il ne souhaite pas des réponses qu'il a déjà aux questions qu'il pose [le fameux syndrôme de la montre du consultant]
Il m’est arrivé dans ma vie de consultant de finir une mission de conseil et de me dire à moi-même : toute l’équipe a bossé au-delà du raisonnable, nous avons enchaîné entretiens sur entretiens, workshops sur workshops, parfois kilomètres sur kilomètres, nous avons produit slide après slide des livrables finalement très épais voire trop épais, mais après tout cela, avant nous finalement réellement répondu à la question que nous posait le client ? Le client lui-même se souvient-il dela question qu’il nous avait posée ? Et si dans les deux cas, au mieux, la réponse est « oui », le client est-il capable de trouver la réponse à la question posée dans les centaines de slides que nous avons livrées …
Il m’est également arrivé de participer à des missions de conseil et d’être en désaccord avec certains partis pris de mon « manager » sur les orientations à prendre encours de mission : « Guillaume, cette problématique est hors champ de notre mission, on va donc évacuer la question et se concentrer sur l’autre sujet ». Avec parfois des intérêts qui n’étaient pas ceux du client,sachant que la question n’avait jamais été formalisée, ni dans la proposition commerciale, ni dans aucun CoPil …Comment aurait-il fallu alors traiter ce« changement » au sein de la mission de conseil ? Quelles sont les questions qui méritent d’être creusées et celles qui doivent « rester au frigo » ? Et comment associer le client aux orientations de périmètre, et parfois d’intention, de la mission de conseil, tout en restant "in time", "in budget"?
Comment appliquer l'agilité aux missions de conseil : les bases de la méthode ACM
Pour répondre à tout cela, la méthode ACM © repose sur un artefact clé : un « product backlog » composé des questions que se posent le client, et que nous appellerons le Consulting Backlog ©. Chaque livrable,en tant qu’objet à produire, peut faire l’objet d’un product backlog, mais il convient de créer un Consulting Backlog©. Le Consulting Backlog © est constitué des questions auxquelles l’équipe de consultant devra répondre (ou pas) pendant toute la durée de la mission de conseil. Ce Consulting Backlog © est structuré comme un « product backlog »au sein duquel les « user stories »sont remplacées par des « Stakeholders questions ».
A la manière d’une user story, chaque Stakeholder Question sera :
· pondérée par une valeur au regard des enjeux portés par cette question et la future réponse associée.
· pondérée par une complexité qui correspond à l’effort que l’équipe de consultant devra déployer pour répondre à cette question, cette complexité dépendra évidemment de la méthode utilisée pour yrépondre (analyse documentaire, interviews, workshops, benchmark, ChatPT [tiens le voilà celui là] ou une autre IA, etc.)
· planifiée dans le temps … c’est-à-dire associé à un sprint au cours de la mission de conseil. Dans le cadre d’une mission de conseil,un sprint pouvant aller de quelques heures à une semaine, voire davantage, en fonction du type de mission, de la durée de la mission et de la disponibilité des sources d’information
L’illustration ci-dessous vous présente un aperçu d’un « ConsultingBacklog ©» purement fictif (avec 4 Stakeholder Questions uniquement pour les besoins de laprésentation) :

La mise en pratique de la méthode réside ainsi principalement dans :
· La bonne formalisation / structuration des questions que se posent les clients
· La capacité à poser une analyse de valeur sur la question
· La capacité à déterminer la meilleure méthode pour répondre à cette question
· Et à établir l’effort nécessaire pour exécuterla méthode
Le Consulting Backlog © est maintenu et priorisé par le Directeur de Mission en relation avec le donneur d’ordre de la mission de conseil (le client).
Il peut être initié dès les phases d’avant-vente, il peut être intégré ou pas à la proposition commerciale,l’engagement peut être formalisé dans le Consulting Backlog © (engagement de réponse à tant de questions, et éventuellement quelles questions de manière précise), quitte à finir annexé au contrat de prestation …
Dans tous les cas, la méthode ACM© nécessite la création de ce Consulting Backlog © au plus tôt, afin que, dès la réunion de lancement, il soit initialisé, présenté au donneur d’ordre, et actualisé / piloté / priorisé au fur et à mesure de la mission de conseil. La constitution même de ce ConsultingBacklog © est une étape nécessaire à la bonne conduite de la « mission de conseil agile ». Idéalement, le Consulting Backlog © est même partie intégrante de la proposition commerciale transmise au client. Pour l'avoir fait cet exercice est généralement particulièrement apprécié.
A partir de cette base, que chaque consultant formé aux fondamentaux de l’agilité aura compris sans trop de difficulté, la méthode ACM ©développe comment :
· Identifier clairement les « personae »de la mission de conseil car le donneur d’ordre d’une mission de conseil est rarement le seul « public » destinataire des livrables de la mission de conseil.
· Alimenter le Consulting Backlog © à partir de sources de« questionnements » : donneur d’ordre, son N+1, ses pairs, ses N-1, son entité, ses clients au sein de l’organisation, le reste de l’organisation (salarié, IRP, …) … par tout type de moyens : réunions,entretiens, workshop, sondages, enquêtes, … sous oublier ChatGPT bien sûr !
· Filtrer ou nettoyer le Consulting Backlog © en écartant les questions à faible valeur ajoutée pour l’entreprise, ou tout simplement dont les réponses sont déjà connues, partagées et communiquées au sein de l’entreprise,
· Prioriser le Consulting Backlog © en fonction de la valeur des questions et de la complexité à trouver la réponse,
· Planifier le Consulting Backlog © en fonction de la démarche générale suivie etêtre capable de s’engager sur la livraison d’une réponse au cours d’un sprint donné,
La posture du consultant ACM
En guise de posture du Consultant Agile, je propose à ce stade un manifeste pour les missions de conseil Agiles,qui, je l’espère, trouvera un écho chez tous les consultants qui partagent les valeurs de l’agilité.

Si vous avez des propositions de corrections sur ce Manifeste, sachez qu'il est susceptible d'évoluer avec les travaux de la communauté Laniakéa.
Les principes sous jacents de l'ACM
A l’instar du Manifesto Agile, un exercice sympathique que chacun peut essayer de faire est de décliner les principes de l'agilité appliquée au logiciel à la mission de conseil. Petit exercice que vous pouvez faire chez vous ou dans votre tête pour essayer de voir ce que cela pourrait donner. Sinon passez au chapitre suivant.
Les douze principes du développement logiciel agile sont les suivants :
- Satisfaction des clients grâce à la livraison précoce et continue des logiciels : les clients sont plus satisfaits lorsqu’ils reçoivent des logiciels fonctionnels à intervalles réguliers, plutôt que d’attendre de longues périodes entre deux versions.
- Tenir compte de l’évolution des exigences tout au long du processus de développement : la capacité d’éviter les retards lorsqu’une exigence ou une demande de fonctionnalité change.
- Livraison fréquente de logiciels fonctionnels : Scrum tient compte de ce principe puisque l’équipe fonctionne par « sprints », ou itérations logicielles, qui garantissent la livraison régulière de logiciels fonctionnels.
- Collaboration entre les acteurs commerciaux et les développeurs tout au long du projet : de meilleures décisions sont prises lorsque l’équipe commerciale et l’équipe technique sont alignées.
- Assister, faire confiance et motiver les personnes concernées : les équipes motivées sont plus susceptibles de fournir un meilleur travail que les équipes mécontentes.
- Favoriser les interactions en face à face : la communication est plus efficace lorsque les équipes de développement sont situées au même endroit.
- Le logiciel fonctionnel est la principale mesure du progrès : la livraison d’un logiciel fonctionnel au client est le facteur ultime qui mesure l’avancement.
- Des processus Agile pour soutenir un rythme de développement cohérent : les équipes établissent une cadence reproductible et tenable à laquelle elles peuvent livrer un logiciel fonctionnel, en la répétant à chaque version.
- L’attention portée aux détails techniques et à la conception améliore l’agilité : les bonnes compétences et une bonne conception permettent à l’équipe de maintenir le rythme, d’améliorer constamment le produit et de soutenir le changement.
- Simplicité : développez juste suffisamment pour effectuer le travail pour le moment.
- Les équipes auto-organisées favorisent l’élaboration d’architectures, d’exigences et de conceptions de qualité : des membres d’équipe compétents et motivés qui ont un pouvoir de décision, s’approprient le projet, communiquent régulièrement avec les autres membres de l’équipe et partagent leurs idées afin de fournir des produits de qualité.
- Réflexions régulières sur la manière de devenir plus efficace : l’auto-amélioration, l’amélioration des processus, le perfectionnement des compétences et des techniques aident les membres de l’équipe à travailler plus efficacement.
N'oubliez jamais ce principe quand même :

Limitations (ou pas) de la méthode ACM
Si « la mission de conseil consiste simplement à produire des documents (généralement appelés livrable) qui formalisent des réponses à des questions », alors pourquoi réduire la méthode aux missions de conseil « amont » ? Tout projet de développement logiciel suscite, en cours de projet, des questions qui nécessitent d’apporter des réponses, et une formalisation adaptée.
En effet, la méthode ACM © peut tout à fait s’appliquer pendant tout projet d’implémentation logicielle, de maintenance, ou de projet de transformation global. En pratique, rien n’interdit de formaliser les questions soulevées au cours d’un projet et de les gérer au travers d’un« Consulting Backlog ©».
La gestion de ce « ConsultingBacklog © » (qui peut tout à fait se différencier du product backlog du projet) peut même être finalement une réponse formelle au « devoir de conseil » que la plupart des clients demande dans leurs appels d’offre.
Vous me suivez ? Alors imaginez que tous les consultants Laniakéa applique cela.

La méthode ACM s'applique t elle à une mission d'audit ?
En matière d’audit, la mission se résume généralement à répondre à une question : l’entreprise est-elle conforme à telle norme ou tel standard ? Le propre de la mission deconseil est sans doute que la route est bien moins tracée et qu’il convient donc de formaliser la route au fur et à mesure du déroulement de la mission, formalisation qui prendra la forme d’un nombre plus ou moins important dequestions, plus ou moins complexes à résoudre, dans un temps plus ou moins long…
La méthode ACM © peut donc s’appliquer à une mission d’audit même si elle me paraît moins pertinente que sur une vraie mission de conseil, notamment en termes de valeur ajoutée sur le résultat de la mission.
Pour en savoir plus sur la méthode ACM
Comme vous l'aurez compris, j'ai intégré le développement de cette méthode au projet Laniakéa. Il n'y aura donc pas d'autre développement public à ce stade, et les consultants freelance qui ont aimé cet article peuvent nous rejoindre et manifester leur intérêt pour cette méthod. J'aurais à coeur de les accompagner dans son développement, et peut-être écrirons nous le futur, le ACM Book à l'instar du PMP Book ;-)